"Promouvoir la Côte d'Ivoire" et relancer le tourisme de la région. C'est au nom de ces deux initiatives que "Le village de Bamboula" a vu le jour en mars 1994, au cœur d'un parc animalier situé à 20 km de Nantes. Soutenu par les pouvoirs publics et le gouvernement ivoirien, Dany Laurent, le directeur du zoo qui porte ce projet, recrute en Afrique une vingtaine d'artistes et d'artisans. Des hommes, des femmes et trois enfants chargés d’animer ce complexe sponsorisé en partie par la biscuiterie Saint-Michel. Biscuiterie qui remporte un vif succès depuis plusieurs années grâce à un sablé chocolaté représenté par un petit personnage noir, nommé "Bamboula".
Le village prend naturellement le nom du célèbre biscuit. Mais derrière le décor exotique, émerge très vite une réalité d'un autre temps. Les droits les plus élémentaires de ces artistes ivoiriens sont bafoués : passeports confisqués, interdiction de sortir du parc, peu ou pas de jours repos, couchage sur un simple matelas posé au sol, tout cela pour un salaire équivalent à un quart de smic. Littéralement exploités, ils sont exposés comme de véritables bêtes de foire. "J'ai encore des images dans ma tête", raconte Eugénie Bamba dans le documentaire Le village de Bamboula, diffusé mardi 18 janvier sur France 2 (23h50). "Ça m'a rappelé d'autres époques. Je me suis dit : Où on est ?", s'indigne celle qui était à l'époque présidente de la Ligue des droits de l'homme de Loire-Atlantique.
Impossible de ne pas penser à la période coloniale et surtout aux "zoos humains" présentés dans les expositions universelles cent ans auparavant. "C'est comme si on était des animaux qu'ils sont allés prendre dans la brousse et déposés là", confirme Edith Lago, une des danseuses de la troupe du village. "Dany Laurent nous a dit qu'on avait qu'à danser seins nus, qu'il y avait des gens qui payaient pour rentrer, qu'ils pouvaient venir tout le temps regarder. Quand on nous demandait : 'Ça va ? Vous n'êtes pas gênées ?' (...) On disait : 'Tout va bien', alors qu'on était mal dans notre peau."
Si les pouvoirs publics cautionnent aveuglément, des militants syndicaux, des droits de l’homme et de diverses associations s'insurgent contre le traitement indigne infligé à ces hommes, femmes et enfants et se réunissent au sein du collectif Non à la réserve humaine. "Il y a deux fillettes de 12 ans. Il y a un garçonnet de 10 ans et demi qui font partis de la troupe et qui assurent les représentations toute la semaine. Ces enfants ne sont pas accompagnés de leurs parents, qui sont restés en Côte d'Ivoire. Ils ne sont pas scolarisés. C'est une honte", s'indigne à l'époque Philippe Gautier, membre du syndicat national des artistes musiciens et du collectif, qui témoigne dans le documentaire.
"Quand j'en parle, j'ai des frissons, se désole Eugénie Bamba, car je les ai trouvés dans un dénuement pas possible. On était à la mi-mars, les femmes étaient en sandales, il n'y avait ni chaussures chaudes ni un pull-over sur le dos. Je leur ai demandé : 'Comment ça se passe ? Vous avez vu des médecins ?' Ils m'ont répondu : 'Non, quand on a des soucis, ce sont les vétérinaires qui s'occupent de nous'."
Grâce à la force d'action du collectif Non à la réserve humaine, qui portera l'affaire devant la justice, Le village de Bamboula ferme définitivement ses portes le 14 septembre 1994. Les artistes et artisans sont rapidement renvoyés en Côte d'Ivoire. Trois ans plus tard, le 1er juillet 1997, le parc et son directeur seront condamnés à verser un franc symbolique aux associations, pour "atteinte à la dignité humaine".
Le documentaire Le village de Bamboula réalisé par Yoann de Montgrand et François Tchernia est diffusé sur France 2 le 18 janvier à 23h50 et visible en replay sur france.tv
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